Le manuscrit de Pétrarque

Ce manuscrit est conservé à Paris, à la Bibliothèque Nationale. C'est le lat. 2993, parchemin 230 x 160 mm, reliure en peau de veau, V et 179 folios, répartis en différents cahiers. Il contient l'essentiel de la correspondance entre Abélard et Héloïse à savoir : "l'historia calamitatum mearum" et la série des sept lettres échangées entre les deux époux séparés. Le texte de la règle manque. On y trouve aussi l'apologie de Bérenger de Poitiers en faveur d'Abélard.

Selon J. Monfrin "Abélard", Paris, J. Vrin, 1978, p. 19, "ce manuscrit a été copié probablement dans le midi de la France, au plus tôt vers le milieu du XIIIe siècle, plus probablement vers la fin du siècle. A part quelques additions, c'est un manuscrit homogène."

Vers l'année 1337, toujours selon J. Monfrin, ce volume devint la propriété de Pétrarque qui s'est particulièrement intéressé à ces textes, ainsi qu'en témoignent un assez grand nombre de notes inscrites par lui dans les marges. Sans doute Pétrarque voyait-il se profiler derrière Héloïse la figure de Laure, l'inaccessible beauté.

Avant de parvenir à la Bibliothèque Nationale, ce manuscrit a été la propriété, en 1426, de la bibliothèque des ducs de Milan à Pavie. De Pavie, il est passé à la librairie de Blois, puis à Paris. C'est l'un des neuf manuscrits - tout comme le manuscrit 802 de la bibliothèque municipale deTroyes - dont J. Monfrin s'est servi pour établir, en 1978, l'édition critique de "l'Historia calamitatum mearum".

On lit :
Ego igitur, oppido quodam oriundus quod in ingressu minoris brritannie constructum, ab urbe Namnetica versus orientem octo credo miliariis remotum, proprio vocabulo Palatium appellatur.


Je suis donc originaire d'une certaine place forte construite à l'entrée de la Bretagne mineure, à l'est de Nantes, éloignée, je crois, d'environ huit miles et qu'on appelle proprement LE PALLET.

 La page ci-dessus constitue donc le début de la lettre à un ami. "Abaelardi ad amicum suum consolatoria." Nous ne savons pas de quel ami il s'agit. C'est en réalité une autobiographie rédigée par Abélard à Saint-Gildas de Rhuys où il était abbé. Cette première lettre a souvent eu pour titre : "Historia calamitatum mearum." L'histoire de mes malheurs.


"A tous ces anciens philosophes, j'en ajouterai un moderne, et qui vivait à une époque peu éloignée de la nôtre, un homme dont l'orthodoxie, à tort ou à raison, fut quelquefois révoquée en doute, mais dont le génie, à coup sûr n'est point ordinaire, je veux dire le fameux Pierre, surnomé ABAILARD. Ainsi qu'il le raconte lui-même dans la longue lettre qui contient l'histoire de ses malheurs, poursuivi par l'envie, il s'enfonça dans la solitude aux environs de Troyes : et ce ne fut pas sans entrainer après lui un immense concours d'hommes studieux, que sa grande réputation de science fit affluer de toutes les villes dans sa retraite. Il ne put cependant pas réussir à trouver le repos qu'il cherchait; la jalousie tenace et la haine de ses ennemis en avaient à jamais ruiné les fondements."
Franciscus Petrarcha
, Lib. II de Vita solitaria

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